La construction en bois produit des immeubles toujours plus grands



La construction en bois consiste à assembler des éléments préfabriqués, ce qui lui permet d'être deux fois plus rapide que l'équivalent en béton. - Photo Promicea


Malgré des difficultés conjoncturelles, la construction en bois semble promise à un bel avenir. L'organisation de la filière et la nouvelle réglementation thermique devraient en favoriser le développement.


Les constructions en bois sont dans l'air du temps. Dernière réalisation de taille en date, le promoteur Promicea a achevé hier la structure d'un immeuble résidentiel en bois massif, à Ris-Orangis (Ile-de-France), qu'il livrera en septembre à 3F, un des plus grands bailleurs sociaux de France. Avec 140 logements, l'immeuble de quatre niveaux se revendique comme le plus grand bâtiment résidentiel d'Europe en un seul tenant en bois massif. « 3F a une dizaine de réalisations en bois à ce jour. C'est du multi-expérimental, nous testons toutes les solutions, résume Yves Laffoucrière, directeur général de 3F. Nous en ferons davantage si les coûts sont maîtrisés et, pour cela, il faut que l'industrialisation monte en puissance. »

Volonté politique

La construction en bois consiste à assembler des éléments préfabriqués, ce qui lui permet d'être deux fois plus rapide que l'équivalent en béton, mais le bois n'est pas moins cher. « La construction en bois massif est de 0 % à 5 % plus cher que la construction en béton », estime Philippe Zivkovic, chez Promicea. Par ailleurs, la filière française peine à s'industrialiser. Un tournant stratégique a été pris il y a quelques jours : la toute première usine française de panneaux de bois massif, Lineazen, a reçu son feu vert technique (lire ci-dessous). Mais l'impulsion vient surtout de la volonté politique et des décideurs économiques, plus motivés qu'il y a encore trois ans. Une série de projets arrivent, toujours plus grands, toujours plus hauts. Le record français, détenu par l'immeuble de 7 étages (en bois massif, mais importé) du bailleur social le Toit Vosgien à Saint-Dié, n'en a plus pour longtemps.
Le plus spectaculaire ? A Bordeaux, l'appel à projets d'Euratlantique porte sur un immeuble en bois de 15 à 17 étages. Une dizaine de candidats sont en lice. « Nous espérons l'annonce du choix en mars, lors du Salon immobilier du Mipim », commente Franck Mathis, un des principaux acteurs de la construction en bois. Dans le concours de la Mairie de Paris, « Réinventer Paris », nombre de projets sont en bois, et on atteint les dix étages. Comme aussi à Champs-sur-Marne, où Arbonis (Vinci) « travaille sur une résidence étudiante de 10 étages », indique son dirigeant, Eddy Magne.
La construction en bois, encore composée majoritairement de constructeurs de maisons individuelles, va avoir besoin de ces projets phares car, depuis 2014, elle se porte mal. A la mode, elle n'en souffre pas moins de la conjoncture, et même davantage que la construction en béton. L'enquête nationale sur la construction en bois parue fin 2015 recense, à fin 2014, 1.984 entreprises, soit 213 sociétés de moins qu'en 2012. Elles employaient 14.700 salariés (- 11 %) pour un chiffre d'affaires de 1,9 milliard d'euros (- 13 %).
Dans la maison individuelle, la part de marché du bois a stagné à 10,4 % entre 2012 et 2014. « Les entreprises sont petites, en moyenne elles ont 4 ou 5 chantiers par an, certaines commencent à disparaître et, si la tendance se poursuit en 2016, on risque de passer sous la barre des 10 % de part de marché », estime Eric Toppan, coordinateur de l'observatoire économique de France Bois Forêt.

Vers un nouvel essor

Plus gros, les acteurs du tertiaire et des grands immeubles résidentiels ne sont pas mieux lotis : le leader du secteur, Arbonis, qui réalisait 60 millions de chiffre d'affaires en 2012, a enregistré une activité moindre en 2015, comme Mathis, dont le chiffre d'affaires 2015 a baissé de 10 % sur un an, à 40 millions d'euros. Mais le secteur devrait prendre un nouvel essor. Tout d'abord, parce que les verrous réglementaires et les normes techniques qui le pénalisaient ont sauté depuis deux ans. Ensuite, parce que, dans la foulée de la loi de transition énergétique, « la nouvelle réglementation qui remplacera en 2020 l'actuelle RT2012 ne prendra plus seulement en compte la performance énergétique, mais aussi, et ce sera nouveau, le rejet de CO2, ce qui favorisera le bois, dont le bilan carbone est meilleur que le béton », explique Patrick Leleu, président de Geoxia et membre d'un des groupes de travail sur la définition des futures normes.
Professionnels et pouvoirs publics planchent depuis six mois et « la définition des indicateurs qui s'appliqueront en 2020 sera prête en juin, poursuit-il. Les valeurs plafonds de consommation énergétique et de rejet de CO2 seront fixées en 2018 pour une phase de test » et s'imposeront deux ans plus tard.  (Myriam Chauvot, Les Echos)

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